Depuis 25 ans que je pratique le
Karaté à Toulouse, mon histoire sportive
est intimement liée à celle de Maître
MURAKAMI. Mon rôle de responsable du Karaté-Do-Shotokaï
Languedoc me permet d'avoir une vue d'ensemble de
l'évolution de cette formation.
Je ne puis commencer sans faire
quelques allusions rapides à la naissance balbutiante
de ce qui devait devenir notre ligue du Languedoc,
si importante aujourd'hui. Je n'hésiterai jamais
à souligner que son essor est d'abord dû
à l'évolution de Maître MURAKAMI,
à sa rigueur, à son exemple et à
ses conseils.
Non seulement, Maître MURAKAMI
était un professeur incomparable, mais encore
il était d'une intelligence remarquable. Il
m'a semblé indispensable de me pencher sur
un passé qui nous est commun à tous,
même à ceux qui se sont éloignés
de nous.
Arrivée
de maître MURAKAMI en france
Maître
MURAKAMI est arrivé en France le 3 novembre
1957 pour y enseigner le Karaté et le Kendo.
Il ne connaît absolument rien de l'Europe. Encore
vêtu d'un kimono et de getas, il ne parle pas
un mot de français. Disciple de Maître
YAMAGUCHI, lui-même formé par Maître
G. FUNAKOSHI, il pratique alors le Shotokan. Doué
d'une énergie extraordinaire, même pour
un japonais, il surmonte immédiatement ses
handicaps. Il voyage pour faire des stages d'enseignement.
Dès le 1er juin 1958, un
premier stage s'organise à Toulouse.
Orientation
vers le Shotokan
Cette
démonstration de Karaté Shotokan entraîne
dans cette voie les premiers responsables toulousains.
Citons parmi ces précurseurs
:
Del Blanco, Romeu, Sajous, Bauredom et Nectoux (1er
dans, gradués en Mars 1961).
Romeu, Bauredom et Nectoux seront
les fondateurs de la Ligue du Languedoc.
Nos professeurs Nectoux et Cazal
deviennent les premières ceintures noires de
la Fédération Karaté-Kendo de
Maître MURAKAMI.
En novembre 1963, je deviens l'élève
de Monsieur Nectoux, dans le dojo du Capitole à
Toulouse. Malheureusement, pour des raisons de
santé, celui-ci se retire, nommant à
la tête du Club Edmond Ragot, ceinture noire
avec Monsieur Molinié, ceinture violette.
Cette organisation est rapidement
défaite par le départ de Mr Molinié
et de tous les élèves. Ils refusaient
de se plier à la dure discipline et à
la rigueur de Maître MURAKAMI.
A travers vents et marées,
nous restons seuls, Mr Nectoux et moi-même.
Répartis de zéro, nous voyons avec satisfaction
la situation s'améliorer. Mon ami Nectoux me
demande de prendre la direction du club du Capitole.
Mr Ragot, toujours énergique, crée une
section à l'E.T.A.M. avec l'appui de notre
excellent camarade Guiral, professeur d'Arts Martiaux.
Ce grave bouleversement fait que pendant 3 ans, les
stages furent supprimés. Pourquoi ? Maître
MURAKAMI était trouvé trop exigeant
par certains et notre ossature était encore
trop faible. Le nombre des cotisations ne permettait
pas de couvrir les frais de stages.
En 1967, la situation des clubs
rétablie, nous nous rendons compte que nous
ne progressons plus. Nous prenons alors contact avec
Mr Tam. Celui-ci, ancien toulousain, est maintenant
à Paris assistant de Maître MURAKAMI.
Bénévolement, avec un magnifique esprit
d'équipe, Mr Tam vient nous préparer
en plusieurs stages à recevoir l'enseignement
de Maître MURAKAMI.
L'orientation
SHOTOKAÏ des annés 67-68
Maître
MURAKAMI, comme tous les gens intelligents, n'a pas
craint de se remettre en ques¬tion. Il a subi
une évolution profonde.
Comment ? A la mort de son père,
il est parti au Japon pour ses obsèques. Dans
son pays natal, il a retrouvé son Maître
et une nouvelle voie.
"Quand j'ai vu Maître
EGAMI, j'ai compris que confusément c'était
ce que je recherchais depuis toujours". Celui-ci
avait été désigné par
Maître FUNAKOSHI comme "seul Maître
dans la voie".
Il se trouve que Maître FUNAKOSHI,
à la fin de sa vie, tout en demeurant fidèle
à la tradition, a complètement remodelé
le Karaté, en lui insufflant souplesse et harmonie.
Pour Maître EGAMI, son disciple, le Karaté
doit être un art martial authentique. Ceci nous
entraîne dans une voie bien différente
de celle tapageuse des briseurs de briques ou des
champions.
Cette conception fut une révélation
pour Maître MURAKAMI. Il décide de renouveler
son enseignement, les mouvements doivent gagner en
souplesse et harmonie. La tension doit disparaître
: c'est détendu que l'élève doit
rencontrer son partenaire.
C'est cela le SHOTOKAÏ.
La
Pratique du Shotokaï
En
libérant nos corps de leurs tensions, notre
Maître nous apprend maintenant à nous
concen¬trer davantage, arrivant ainsi à
"irimi" : intuition permanente de l'adversaire.
Maître MURAKAMI traduisait "irimi"
par "l'anticipation sur l'anticipation".
Tous ceux qui, comme moi, désirent
continuer et enseigner le SHOTOKAÏ de Maître
MURA-KAMI, ont été séduits par
ce qu'il ne contrarie pas la nature profonde de l'homme.
Une autre idée intéressante
est de savoir que l'on peut progresser sans cesse,
quelque soit l'âge. Devant cette harmonie proposée
par notre Maître, certains "gros durs"
ont cru qu'il ne pouvait y avoir d'efficacité.
Un nouveau schisme s'est produit sur cette base. A
mon avis, c'est une grosse erreur. Plus je pratique
le SHOTOKAÏ, plus je suis conscient de sa réelle
efficacité.
Premiers
éfforts d'union avec la F.F.J.D.A.
En
raison des nouvelles dispositions du Ministère
des Sports, Maître MURAKAMI décide avec
l'aide d'un de nos pionniers du SHOTOKAÏ, Mr
FONFREDE, de mettre en place une politique d'intégration
à la Fédération de Judo et Disciplines
Associées qui deviendra par la suite la Fédération
Française de Karaté et Arts Martiaux
Affinitaires.
Politique
de maître MURAKAMI à partir de cette
période.
Elle
devait être intégralement appliquée
à Toulouse. La voici :
- développement
des licences,
- obtention des diplômes
d'Etat pour les responsables,
- déclaration
officielle des salles à la "Jeunesse et
aux Sports".
En 1970, le Maître crée
le MURAKAMI KAI. Cette politique générale
officialise le 1er noyau de responsables encore 3e
kyu sous la responsabilité de Mr Ragot, 1er
dan.
C'est ainsi que je devins responsable
du Judo Club du Capitole, section Karaté. Nommons
parmi ces responsables : MM. Heuzé, Han Tsé
Chuen, Orbizo, Laville et Corbin.
En 1969 à Sérignan,
ces 5 mousquetaires décrochent leur ceinture
noire. L'excellent travail de notre Ragot se complète
par la désignation de Heuzé comme responsable
de l'ETAM. Grâce au sérieux de notre
groupe et à nos démonstrations, nous
affirmons notre style devant les Présidents
de Ligues. Nous devenons les interlocuteurs vala¬bles
de Mr Del Blanco, du regretté Michel Capelle
et actuellement de Mr Gonzales. Heuzé devient
professeur à l'ETAM. Han Tsé Chuen s'occupe
du Dojo de l'université Paul Sabatier. Moi-même,
je deviens responsable du MURAKAMI-KAI du Languedoc,
professeur de Karaté au Dojo du Capitole. C'est
en 1973 que je recevrai avec 4 autres responsables,
le Brevet d'Etat de profes¬seur de Karaté.
Alibert, le premier de mes élèves à
être ceinture noire, se dépense jusqu'à
l'épui¬sement pour créer de nouvelles
salles. Il dirige le club de Sauzelong-Rangueil en
1974. Malheureu¬sement, sous l'influence de différents
facteurs, il abandonne un peu plus tard.
Bréonce, ceinture marron,
quitte Toulouse et s'établit à Pamiers.
Il y crée un centre important en pleine évolution.
Je suis allé pendant longtemps l'aider à
créer son propre noyau.
Devenus ceintures noires, Paraga
et Destarac continuent à animer énergiquement
l'ETAM, secondant Heuzé qui s'y donne à
fond. Pour des raisons indépendantes de notre
volonté, le Dojo du Capitole se ferme. Nous
devons trouver d'autres locaux.
Nous avons eu la chance de trouver
2 Dojos :
- à Ancelys en 1973,
- à Bonnefoy-Lapujade en
1977 dans lequel je travaille alternativement.
Le
SHOTOKAÏ du Languedoc est en pleine expension.
Maître
EGAMI vient à Paris en 1976. J'ai l'honneur
de lui être présenté comme responsable
du MURAKAMI-KAI du Languedoc.
Entre temps, après la visite
de Maître EGAMI en 1976, Maître MURAKAMI
est confirmé comme responsable européen
pour le SHOTOKAÏ. Maître MURAKAMI nous
donne les pleins pouvoirs pour faire prospérer
nos Dojos, en faire une pépinière de
ceintures noires. Le Club de Bonnefoy-Lapujade démarre
bien dès ses débuts. Belmonte, ceinture
noire SHOTOKAN, nous rejoint. Après un recyclage
de quelques années, il passe en même
temps que, mon élève Miota, la ceinture
noire SHOTOKAI.
La ceinture noire de Bréonce,
retardée par son absence à plusieurs
stages du Maître, récompense enfin ses
dons. Heuzé quitte l'ETAM pour raison de santé.
Destarac le remplace. Pujol, élève de
Bréonce, devient ceinture noire, ce qui lui
permet d'aider celui-ci. En 1982, nommé 2éme
dan, je continue à m'occuper de Bonnefoy-Lapujade,
pépinière de futurs professeurs.
Xavier Corbin
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